Homélie du père Benoît - Dimanche 02 juillet 2023
St Jean de Belcier, Sacré Cœur, 2 juillet 2023
Souvent la vie spirituelle, avec sa dynamique et son évolution propre, est comparée à l’escalade d’une haute montagne. L’être humain se trouve assez seul au pied de la montagne, enfermé par l’ombre dans la vallée de larmes avec une grande soif de bonheur, avec un désir rongeant de Dieu, une nostalgie de son Créateur. C’est par son propre péché que l’homme a chuté aussi bas que possible. Mais Dieu l’appelle. Dieu attend chacun de nous au sommet de la montagne où on le verra face à face, en pleine lumière, avec un horizon de bonheur de 360º sans limites.
Mais il faut monter d’abord. Monter la montagne dans notre vie intérieure, ce sont les efforts, les purifications, les souffrances spirituelles ou morales.
Mais en Europe, surtout dans les Alpes, les montagnes ont plusieurs flancs, plusieurs côtés. Les flancs côté nord sont les plus difficiles, les plus rudes, les plus dangereux à grimper. Heureusement il y a aussi les flancs côtés sud : plus ensoleillées, moins rudes, plus stables et graduels, moins dangereux, plus motivants pour arriver au sommet. (côté nord = côté Belgique, Norvège, Islande, gris et froid ; côté sud = les Antilles, La Réunion, l’Afrique : soleil, palmiers, eau turquoise transparente, fleuri de toutes les couleurs … )
Dans notre vie spirituelle, notre relation avec Jésus c’est pareil. Aujourd’hui Jésus nous explique d’abord le flanc nord, rude, difficile pour arriver à Dieu : l’exigence de prendre sa croix et de suivre Jésus, l’exigence de perdre sa vie pour la trouver, l’exigence d’aimer Dieu plus que tout, au-dessus des personnes que nous aimons le plus comme nos parents, notre famille, un ami de cœur, les petites princesses. Jésus est exigeant. Le Christianisme est exigeant. L’appel de Jésus est radical. Peut-être qu’en Europe, dans les pays riches, nous avons trop adouci le chemin de Jésus. Le Pape François parle d’anesthésie. Des Chrétiens endormis. Le manque de vocations ne serait-il pas lié aussi à ce manque de propositions exigeantes et radicales que les jeunes recherchent ?
Avec cette explosion de la spirale de la violence en France je dirais aux jeunes, aux étudiants : qu’est-ce que vous attendez ? Dès qu’il y a le moindre désir dans votre cœur, dans vos pensées, à donner votre vie au Christ, comme prêtre ou religieuse, arrêtez les années interminables de discernement, de donner priorité aux études mondaines, d’évaluer les pours et les contres, de vouloir encore profiter des vacances et des voyages … Notre maison est en flammes. Plus de temps à perdre. Inscrivez-vous au séminaire pour le mois de septembre, présentez-vous au couvent cet été encore !
Jésus parle de donner sa vie. Oh, comme c’est facile de donner son opinion ! Oh, comme c’est facile de donner de l’argent et plus on en a, plus c’est difficile d’en donner. Mais Jésus nous invite à donner notre vie en renonçant à nous-même. Une personne est incapable d’aimer une autre personne si elle n’est pas capable de renoncer à soi-même. Devenir mature et adulte est la capacité de penser d’abord à l’autre plutôt qu’à soi-même. Une des causes de cette violence gratuite ne serait-elle pas une immaturité globalisée ?
Jésus ne dit pas de ne pas aimer père, mère, frères et sœurs, enfants. Au contraire, Dieu nous invite à aimer davantage les membres de nos familles mais l’amour pour Dieu doit être encore plus fort ou plutôt l’amour pour Dieu doit être la source de l’amour pour ma famille.
Ainsi, nos valeurs familiales seront toujours ouvertes. Ce n’estpas du cocooning, la famille ne doit pas être comme un cocon renfermé sur soi-même mais plutôt comme une ruche : avec la capacité des abeilles de trouver à l’extérieur des richesses et des valeurs, les amener dans l’essaim, le sein de la famille, pour y produire du miel, la bonté et la tendresse de la vie: un échange continu et ouvert sur le monde, sur la nature, l’environnement.
Mais Jésus termine en expliquant aussi le flanc sud, le chemin vers Dieu qui nous motive : la récompense n’est pas en proportion avec l’effort, la récompense dépasse de loin l’effort. « Tout ce que vous avez fait à un de ces petits, frère ou sœur, c’est à Moi que vous l’avez fait et vous ne perdrez pas la récompense. » Même un simple verre d’eau … (pas mal d’y être rappelé au début de l’été … ) Et chers parents, ne donnez-vous pas beaucoup plus à vos enfants qu’un simple verre d’eau ?
Jésus veut nous encourager car personne n’est dénué d’épreuves dans la vie et ces épreuves peuvent parfois devenir écrasantes. Jésus nous dit que nous ne sommes pas seuls pour grimper la montagne. Il est descendu de la montagne, descendu du ciel pour nous montrer le sentier et pour nous accompagner. Il est notre guide et double sécurité. En escalade, sur les vias ferratas il faut toujours s’assurer par deux mousquetons.
Non, les Chrétiens, nous ne sommes pas des égoïstes qui faisons nos bonnes actions dans le seul but de la récompense, le ciel. Non, nous essayons de faire le bien avec nos limites et avec humilité, par amour, comme réponse à l’Amour infini de Dieu qui nous a aimés le premier. Et le ciel est notre grande espérance. Une espérance, oui, qui nous donne motivation, force et persévérance. Pour le dire tout simplement : nous croyons que Dieu nous y attend à la fin de notre vie terrestre.
Amen.