Homélie du père Benoît - Dimanche 04 septembre 2022
Ste Croix, 4 septembre 2022
Des paroles de Jésus, mais rudes et très exigeantes ce dimanche ! Préférer Jésus avant ses parents, avant sa femme, avant ses enfants, avant ses frères et sœurs. Préférer Jésus avant sa belle-mère, oui, d’accord, avec joie, c’est facile. Mais préférer Jésus avant ses possessions et même avant sa propre vie et prendre sa croix … cela nous semble exagéré, petite odeur de fondamentalisme … Cherchons le vrai sens.
L'évangéliste Luc décrit Jésus comme un rabbin ambulant, un maître routier : Il est en chemin, Il parcourt les régions de la Palestine, Il a une mission et un but : Jérusalem !
Aujourd'hui, nous apprenons que de grandes foules faisaient route avec lui. Pour quels motifs ? Toutes sortes de motifs :
- des motifs nobles tels que la recherche du vrai Dieu, la recherche du chemin de vie qui mène au vrai bonheur, recherche d'aide et de guérison pour soi-même ou un proche malade
- ou par simple curiosité : sensationnalisme, soif de miracles, de quelque chose de spécial, de phénomènes surnaturels ou paranormaux, d’un peu d’action dans la monotonie d’une vie sans portable ni internet, quelque chose qui fait le buzz.
- Puis il y avait aussi les lâches avec des motifs moins nobles : égoïsme, profit personnel : “voyons ce qu’on peut gagner en se traînant derrière Jésus” (comme les mouettes derrière le tracteur ou derrière le bateau de pêche); et il y avait les paparazzi venus dans l’espoir de vendre leur magazine people avec Jésus en couverture (Palestine Match) et les espions qui tentaient d'attirer Jésus dans un piège.
Jésus veut nous faire comprendre qu'il y a une différence radicale entre les masses qui marchent avec lui d'une part, et ses vrais disciples d'autre part. Suivre Jésus, être son disciple, être simplement chrétien, demande un détachement radical. Nous devons être libres intérieurement de tous nos biens et de tous les liens. Les gens de la liberté intérieure.
Ce n'est pas facile car notre cœur est comme un gros aimant puissant et le monde qui nous entoure est comme une quincaillerie. Notre cœur est attiré par tout et n'importe quoi et attire tellement de choses ou de personnes qu’il menace de suffoquer et commence à perdre toute mobilité ou vie.
Les maîtres de la vie spirituelle donnent l'exemple d'un oiseau : qu'importe si un oiseau est lié par une petite ficelle mince bon marché ou par une fine chaîne d'or d'une beauté élégante ou par une lourde chaîne de fer. Le résultat est le même partout : l'oiseau ne peut pas voler. Nous avons été faits pour voler, pour prendre de la hauteur dans cette vie. Le problème ne consiste pas dans la quantité des possessions ou des richesses, beaucoup ou peu, mais c’est notre attachement, notre dépendance, oui, notre addiction à nos richesses qui pose obstacle pour suivre Jésus.
Dans la deuxième lecture, saint Paul demande à son ami Philémon de se libérer d'un bien très précieux : à savoir son esclave Onésime. Onésime était de la main d’œuvre gratuite, travail au black d’immigrant ou de réfugié 24h/24 et 7j/7. Cet Onésime s’était enfui de chez son maître et avait demandé asile à Paul, lui-même assigné à domicile à Rome. Grâce à un contact quotidien avec Paul, Onésime est également devenu chrétien et fils spirituel de Paul. Maintenant, Paul le renvoie à son patron avec une lettre et un plaidoyer pour qu'Onésime soit libéré et qu’il soit considéré non plus comme un esclave mais comme un frère. Ceci avec des magnifiques paroles : "Je n’ai pas voulu te forcer ou t’obliger pour que tu accomplisses ce qui est bien, non par contrainte mais volontiers !"
Dieu ne nous parle-t-Il pas à chacun de nous dans les mêmes termes ? : « Je ne veux rien imposer : ta bonté doit s'exprimer spontanément ! » L'amour ne peut pas être forcé. L’amour jaillit de la libre volonté.
L'invitation de Jésus au détachement radical peut résonner fort à nos oreilles et nous pouvons la redouter comme un poids supplémentaire sur nos épaules, comme un naufrageur de fête, comme un effort purement négatif.
La vérité est tout le contraire : Jésus veut faire de nous des personnes libres. Les personnes de la liberté intérieure sont aussi des personnes heureuses.
Décidez-vous. Voulez vous être des mouettes derrière le tracteur ou le bateau de pêche pour récupérer des miettes ? Ou désirez-vous devenir des vrais disciples de Jésus Christ, des disciples missionnaires ? Les conditions sont claires.
Dieu veut que nous soyons heureux maintenant et dans la vie éternelle. Amen.