Homélie du père Benoît - Dimanche 17 septembre 2023
Sacré Cœur, 17 septembre 2023
Qui d’entre vous aime bien vivre endetté ? Qui se trouve à l’aise et se sent libre en ayant des dettes envers une autre personne ? Vivre toute une vie de manière endettée est une souffrance. C’est vivre avec une épée au-dessus de la tête. Une épée qui à tout instant peut nous tomber dessus et nous trancher la tête. Le symbole de la dette est une grande boule de fer attachée par une épaisse et lourde chaîne à notre jambe. Les dettes nous immobilisent. ( Seulement Dame France continue à vivre sans soucis avec 3 mille milliards de dettes sur ses épaules. Oui, douze zéros. Son bel héritage qu’elle accumule pour ses petits-enfants … )
Jésus nous enseigne que nos péchés sont une forme de dette. Une dette de justice et de charité. Quand j’ai perdu patience en me mettant en colère et en criant sur mon prochain, j’ai une dette envers lui car je ne lui ai pas offert la justice, la bienveillance, l’amabilité et la gentillesse auxquels il a droit en tant qu’être humain, créé à l’image de Dieu pour aimer et pour être aimé.
Quand tu as dit du mal derrière le dos de ta collègue en diffusant des mensonges, tu as une dette envers elle car tu ne lui as pas offert la justice et la vérité auxquelles elle a droit comme tout être humain.
Mes péchés me comblent de dettes. Le Notre Père en latin se traduit justement : « Remettez-nous nos dettes, comme nous les remettons à nos débiteurs. »
Mes péchés me rendent aussi malade. Car je suis créé pour aimer et être aimé. Aimer Dieu et chaque être humain. Être aimé par Dieu et par mes frères et sœurs. Quand je commets le mal en pensées, en paroles ou en actions, je montre que je ne suis plus capable de vivre comme un être humain, donc, que je suis malade.
Dieu enseigne à Pierre de toujours pardonner. Dieu demande à chacun de nous de pardonner sans limite. Parce que pardonner c’est libérer, pardonner c’est restituer la dignité d’enfant de Dieu, pardonner c’est guérir.
Un jour en Seine et Marne, j’ai été confronté à un jeune de 16 ans, ancien servant d’autel, qui s’est laissé entraîner en agressant une personne innocente pour lui voler son Iphone 15. Il a dû passer 2 jours en détention provisoire tout seul dans une cellule sans aucun contact avec l’extérieur. Il a avoué qu’il n’a pas arrêté de pleurer et de crier vers Dieu.
Le pardon de Dieu ne lui a pas seulement effacé une dette mais il l’a guéri. Il était conscient que la gravité du péché l’avait transformé en criminel, un changement existentiel, beaucoup plus grave que la valeur d’un Iphone 15 qui a enfin un adaptateur universel. Le pardon de Dieu lui a redonné sa dignité d’enfant de Dieu. Il a pu dire : « J’étais devenu un criminel mais je ne le suis plus, grâce à Dieu. »
Sur le clavier de l’ordinateur de Dieu c’est la touche « SUPPRIMER » qui est la plus usée ! Dieu pardonne tout le temps. L’erreur est humaine mais pardonner c’est divin. Dieu ne se limite pas à renvoyer nos péchés dans le panier poubelle mais Il passe l’éponge, Il les efface et les détruit. Rien ne reste dans la mémoire. Nous, êtres humains, si finalement nous arrivons à pardonner les offenses, ils restent quand même dans notre mémoire avec le danger qu’un souffle léger ranime le feu de notre colère ou de notre haine… ( un malin dira : mon père, sur mon ordi c’est aussi la touche supprimer qui est la plus usée mais à cause des quantités de fautes de frappes que je commets … )
Combien de souffrances, combien de ruptures, combien de guerres pourraient être évitées, si le pardon et la miséricorde étaient notre style de vie ! Même en famille, surtout en famille : combien de familles divisées qui ne savent pas se pardonner, combien de frères et sœurs qui portent la rancœur en eux et entre eux ! Il est nécessaire d'imprégner toutes nos relations humaines avec l’amour miséricordieux plein de tendresse et pitié : entre époux, entre parents et enfants, au sein de nos communautés, dans l’Eglise et également dans la société et dans la politique.
Le Pape François nous rappelle qu’il n’est pas facile de pardonner car pardonner c’est divin. Il nous faut l’aide de Dieu. Parfois, dans les moments calmes, c’est facile de dire qu’on a pardonné mais plus tard dans l’agitation, tout à coup la rancœur et la haine peuvent soudainement revenir comme une mouche d’été agaçante qui vient et qui revient et qui revient encore avec son bruit énervant …. Ou comme les moustiques tigres bordelais… Pardonner n’est pas une question d’un moment, mais une attitude permanente contre l’envie de vengeance ou de régler ses comptes.
Depuis notre baptême, Dieu nous a pardonnés, en nous remettant une dette insolvable et infinie : le péché originel. Mais il s’agit- là de la première fois, du premier pardon. Après, suivent tous les autres pardons jusqu’à 70 fois 7 ! Avec une miséricorde sans limite, Il nous pardonne toutes nos fautes toujours et partout dès que nous montrons ne serait-ce qu’un petit signe de repentir.
Soyons cohérents et prions le Notre Père sans rougir : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ! » Amen.